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updated 6:15 PM UTC, Mar 18, 2025

Interview de notre Ministre général frère Roberto Genuin

Le frère Roberto Genuin, religieux vénitien né en 1961, a été confirmé il y a quelques semaines comme responsable de l'Ordre des Frères Mineurs Capucins, « environ 10 000 religieux dispersés dans 110 pays du monde », pour un nouveau mandat de six ans (2024-2030). Supérieur général de cet institut masculin depuis 2018, il est le 73èmeMinistre général de l'Ordre Franciscain, le troisième en ce début de millénaire (après le Canadien John Corriveau et le Suisse Mauro Jöhri). Il est originaire de Venise comme le frère Flavio Roberto Carraro (1932-2022), Ministre général de 1982 à 1994 qui fut appelé par Jean-Paul II à diriger les diocèses d'Arezzo-Cortona-San Sepulcro puis de Vérone. 

Le religieux, vêtu du traditionnel habit brun, vit son second mandat de Ministre général « comme un moment de grâce pour investir surtout dans les jeunes, pour ne pas les laisser seuls mais croire dans leur potentiel, y compris dans leur potentiel vocationnel ». Les récentes JMJ de Lisbonne et l'héritage du magistère de Jean-Paul II qui leur est consacré ont confirmé combien il est important pour l'Église d'écouter et de répondre à leurs attentes ainsi qu’àleurs questions sans réponse sur la vie et le sens du sacré ». Et il ajoute : « Comme modèle convaincant d'une authentique pastorale des jeunes et de l'évangélisation, surtout sur le Vieux Continent, je me suis inspiré de la figure du futur saint Carlo Acutis (dont les restes reposent dans le Sanctuaire de la Spoliation qui nous a été confié à Assise). Par son témoignage, il attire de nombreux jeunes à découvrir l'essentiel du message évangélique ».

Quel est donc le secret pour attirer les jeunes ? « Tendre vers une rencontre personnelle avec le Seigneur, à travers une proposition sérieuse, et laisser germer les fruits de ces appels quand Dieu le veut, sans se presser... ».

Le Père Genuin nous reçoit au siège de la Curie générale des Capucins, Via Piemonte à Rome, où les frères nous ouvrent leurs portes avec leur traditionnelle formule de bienvenue, « Paix et bien », salutation souvent reprise à la télévision par la voix et la bouche des deux illustres frères du 20ème siècle que sont Mariano de Turin et l'ancien prédicateur de la Maison Pontificale et aujourd'hui Cardinal Raniero Cantalamessa. « J'espère, dans le sexennat qui m'attend, confie-t-il, maintenir vivant le charisme de la Fraternité, mais aussi apporter une atmosphère de joie et d’allégresse dans tous les couvents de la planète, dont l'Érythrée prochainement, et si possible, la Biélorussie. J'espère, dans ce contexte, offrir à mes frères le style propre de simplicité et d'annonce de la Bonne Nouvelle si cher ànotre fondateur et Père François d'Assise ».

Face à l'hiver démographique du Vieux Continent et à la crise des vocations, frère Genuin voit aussi des signes de renaissance et d'espérance. « Pour la première fois - explique-t-il - la Conférence capucine italienne n'est pas la plus nombreuse de l'Ordre car elle est précédée par celle de l'Inde. Elle reste une réalité importante avec plus de 1 500 frères, mais la moyenne d'âge est très élevée. Mais en France, souvent considérée comme une terre de forte sécularisation, deux fraternités internationales sont nées, après 30 ans de désert vocationnel, dans lesquelles vivent ensemble des frères du monde entier, et avec la surprise d'un beau groupe de jeunes qui rejoignent notre vie. Le secret de cette renaissance inattendue de la vie religieuse ? Je crois qu'il réside dans le style de vie et de prière simples et communes, dans les valeurs de fraternité et d'accueil de tous, et dans les propositions traditionnelles de notre apostolat, comme l'administration des sacrements, en particulier l'Eucharistie et le sacrement de la réconciliation dans nos couvents ». Parmi les signes de renaissance de la vie capucine en Europe, note encore frère Genuin, il y a « la réouverture prochaine et inattendue d'un ancien couvent dans les Pays-Bas, aujourd'hui déchristianisé ». Et il ajoute un détail : « Je pense que sur le Vieux Continent, comme l'avait envisagé mon prédécesseur Mauro Jöhri, nous nous retrouverons finalement avec un nombre réduit de provinces par rapport au glorieux passé, mais avec un réseau de fraternités de plus en plus international, où beaucoup d'Africains et d'Asiatiques cohabiteront avec des Européens de naissance, comme c'est le cas aujourd'hui, après tout, dans notre monde très globalisé ».

Ce qui réconforte le Père Genuin, c'est la bonne et constante croissance des Capucins en Asie, en particulier en Inde, en Thaïlande, en Indonésie, au Vietnam, aux Philippines, en Corée du Sud et au Bangladesh. Et de ses six premières années comme général, il rappelle l'expérience qu'il a vécue sur le terrain dans les Amériques, avec toutes les provinces de ce continent, « où le marcher ensemble et le style de fraternité, d'écoute et de confrontation nous ont aidés à surmonter de nombreuses situations de fragilité, souvent structurelles, et à créer un véritable réseau d'entraide et d'écoute entre nous les frères. C'est ainsi que nous avons surmonté et résolu tant de problèmes ». Comme les précédents Ministres généraux, le frère Roberto espère visiter « au cours de ces 12 années de généralat » toutes les présences capucines dans le monde. Parmi les nombreuses figures charismatiques de l'Ordre, il identifie évidemment le très actuel saint Pio de Pietrelcina (1887-1968), mais aussi le style simple et convaincant du vénérable frère bergamasque Cecilio Cortinovis (1885-1984) qui a consacré sa vie aux pauvres de Milan, ou encore le grand saint et docteur de l'Église Laurent de Brindes (1559-1619).

« Un des traits qui nous distinguent le plus – note finalement le frère Genuin - c'est la joie d'être frères. Le Ministre général ne doit pas prétendre diriger, mais animer le chemin des frères de telle sorte qu'ensemble nous comprenions mieux où le Seigneur nous conduit. Je crois que ce que j'ai pu expérimenter au cours de mes six premières années comme supérieur général, c'est précisément cela : trouver dans les murs de nos couvents, non pas un bonheur superficiel, mais un bonheur véritable, en reconnaissant combien le Seigneur agit dans nos vies de simples hommes de Dieu ».

Publié le 2 janvier 2024 dans le quotidien « Avvenire ».

Dernière modification le jeudi, 16 janvier 2025 10:25

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